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Bilan lecture - Octobre 2022

Après un mois de septembre pour le moins intense, j'avais hâte de me plonger dans ma pile d'octobre. Et elle m'a récompensée avec un nouveau coup de cœur !


The Anatomy of Story, John Truby · 2007


Voici l'un des livres les plus influents sur l'écriture. Il explore en détails comment structurer un scénario via le parcours du personnage principal, et comment construire le monde autour de lui plutôt que l'inverse. Habituellement, j'aime lire les manuels d'écriture d'abord d'une traite (sur plusieurs jours bien sûr) et y revenir ensuite plus lentement, au fur et à mesure que le besoin s'en fait sentir, pour mieux adapter les conseils à mes propres projets. Donc je n'ai pas encore fait passer à ce livre le test de mon propre processus (si tant est que j'en aie un, ce qui n'est absolument pas avéré).


Ce livre étant un monument pour beaucoup, certains éléments m'étaient familiers parce que j'en avais entendu parler de seconde main, par d'autres personnes. Mais il me restait beaucoup à découvrir, et en particulier comment Truby rejette le scénario en trois actes au profit de sa version en... 22 étapes. J'ai eu un petit moment de recul, mais ne crains rien, gentil adelphe écrivain, Truby concède que seuls 7 sont essentiels.


Dans l'ensemble, je suis curieuse de voir comment je peux appliquer ses conseils pour la partie de l'écriture qui me pose le plus problème : le scénario. Team Jardinière au rapport.


Une chose que je reprocherais au livre, mais qui n'est en fait pas du tout sa faute : j'aurais aimé qu'il ne se focalise pas tant sur l'école américaine de l'écriture, ce qui est stupide parce que c'est justement tout l'intérêt de ce livre.


CW : aphobie.


le livre est posé debout à l'avant d'une étagère de bibliothèque, avec des rangées de livres à l'arrière-plan.

La Cité des Méduses, Emmi Itäranta · 2015 (2017)


D'abord, un grand merci à mon amie Nina de m'avoir fait découvrir ce roman par l'autrice finnoise Emmi Itäranta. Je n'en avais jamais entendu parler bien qu'il soit assez récent.


Ensuite, est-ce qu'on parle de la beauté exceptionnelle de ce roman? Oui? Merci. C'est un de ceux qui commencent sans faire de bruit pour laisser les lecteurices découvrir le monde petit à petit et s'habituer aux personnages avant que le rythme s'accélère. Mais ce qui m'a fait chavirer, c'est l'atmosphère et la prose.

Nous nous trouvons sur une île où nous suivons la vie recluse d'une tisseuse, Elliana. Toutes les tisseuses vivent dans une sorte de citadelle, séparées du reste des habitants, et mettent rarement le pied à l'extérieur. L'histoire commence quand l'extérieur s'infiltre dans la citadelle sous la forme d'une femme qui débarque là après avoir été attaquée. Sur sa main est tatoué le prénom d'Elliana, bien que les deux ne se soient jamais rencontrées. Elles sont rapprochées par ce qui semble être le hasard, tandis que dans les rues au pied des murs de la citadelle, une étrange épidémie de cauchemars sème le désordre.


Ce qui s'en suit est une douce histoire enveloppée de mystère, qui enfle à mesure que les chapitres passent. L'imagerie du tissage imprègne le texte sans l'alourdir. L'autrice porte aussi une attention soutenue à la lumière, qui sur cette île est fournie par des bulles de verre en forme de méduses, remplies d'une eau riche en algues qui émet une lumière bleutée. Tout cela contribue à baigner le récit dans une atmosphère picturale un peu fantômatique, servie par de superbes phrases qui coulent comme de l'eau.


Emmi Itäranta est une autrice finnoise qui écrit tantôt en finnois, tantôt en anglais. La Cité des Méduses a été traduite du finnois par Martin Carayol, et je trouve que ce traducteur a fait un travail formidable parce qu'à aucun moment je ne me suis rappelée que je lisais une traduction.


Rep : personnages noirs et bruns. Personnage principal sapphique, personnage secondaire intersexe.


CW : sang, épidémie, claustrophobie (je suis légèrement claustrophobe mais ça n'a pas été un problème pour moi). Brèves mentions de feu et d'esclavage.


Le livre est posé sur une petite table en bois sombre, à côté d'une branche d'eucalyptus. Un tissu à motif occupe l'arrière-plan.

Les Petites robes noires, Madeleine St John · 1993 (2019)


Les Petites Robes Noires, c'est Jane Austen qui rencontre Zola. On est en 1959 à Sydney et on suit une tranche des vies des vendeuses de prêt-à-porter pour dames du grand magasin F. G. Goode's. Les points de vue alternent au rythme de chapitres très courts qui se dégustent à toute vitesse. J'ai aimé l'écriture incisive et le traitement des personnages, mais j'ai regretté un manque de recul vis-à-vis des préjugés ancrés de l'époque : les femmes sont décrites par leur taille de vêtement et si elles ne sont pas mariées et n'ont pas d'enfants avant 30 ans alors leur vie est fichue. De plus, on suit quelques personnages tout juste émigrés, mais on évolue exclusivement parmi la petite bourgeoisie de Sydney et cela manque un peu d'autres perspectives, même si j'ai conscience que cela aurait dépassé les ambitions de cette comédie de mœurs. Tout cela rend la lecture un peu amère, mais c'est un livre qui reste plaisant même s'il ne me laissera pas de souvenir impérissable.


CW : grossophobie, sexisme.


le livre est ouvert sur une malle ancienne, avec un sol de tomettes à l'arrière-plan.

Fool's Assassin, Robin Hobb · 2014


Robin Hobb est l'exemple parfait que la fantasy est ce que vous en faites. Elle ne suit pas nécessairement des personnages jeunes et forts qui vivent des aventures excitantes. Elle peut aussi nous parler d'un homme dans la cinquantaine, qui n'est pas blanc, et qui profite enfin d'un peu de paix pour réfléchir à son passé troublé tout en voyant son épouse vieillir plus vite que lui. Il réfléchit au prix de la magie, à ses amis perdus et à sa place dans un corps qui n'est pas tout à fait le sien.


Ce livre, le premier tome de la trilogie du Fou et l'Assassin, déborde de mélancolie et d'inconfort. On retrouve ce cher Fitz, prisonnier d'un corps plus jeune que son âge, et qui voit ses proches vieillir. On ressent le passage des saisons et on remarque des petites choses étranges qui ne semblent pas importantes sur le moment mais qui finissent par s'assembler en une tapisserie dont le motif est toujours indistinct mais n'annonce rien de bon.


Après avoir suivi Fitz pendant 6 longs livres, je ne m'en lasse toujours pas, et les tomes précédents rendent celui-ci d'autant plus poignant. C'est un livre triste, mais qui réserve aussi quelques rayons de soleil et de nouveaux personnages fantastiques, certains que j'adore et d'autres que j'aime détester.


J'ai comme d'habitude une liste des avertissements de contenu ci-dessous, mais je veux vous mettre en garde explicitement contre la fin de ce livre, qui contient une scène de souffrance animale insoutenable. Je ne m'en suis pas remise 5 ans après ma première lecture, et cette fois-ci j'ai pris bien garde de la sauter. C'est la pire de toutes, et bien que Robin Hobb traite d'ordinaire ce sujet avec beaucoup de délicatesse, je crois qu'ici elle est allée trop loin. Le fait que j'aime néanmoins toujours ce livre et que je continue à le recommander en dit beaucoup sur ses autres qualités, mais soyez prévenu.e.s.


Rep : personnage principal à la peau brune et possiblement polyamoureux.


CW : description de blessure, harcèlement et validisme, mort et extrême souffrance animale, deuil.


le livre est posé sur une chaise ancienne devant un rideau gris à motifs.


Le Vieil Homme et son chat, tome 4, Nekomaki · 2018


Les aventures de Daikichi et Tama sont toujours un régal à suivre au fil des saisons sur leur petite île. J'ai trouvé cet épisode encore plus douillet que les précédents, si c'est possible, car les quelques chapitres plus sombres qui émaillent les tomes précédents sont particulièrement courts et on est habitué grâce aux tomes précédents à ce que tout se termine bien. C'est un spoiler que je me fais un devoir de vous donner sachant combien les histoires impliquant des animaux ont tendance à se terminer mal dans d'autres textes (voir ma chronique précédente).


CW : mentions très brèves de cancer et de deuil. Scène de pêche puis une scène de cuisine où le personnage prépare un poisson dans le détail.


Le livre est posé sur un tissu noir à motif de large fleurs grises.

Tous les Oiseaux du ciel, Charlie Jane Anders · 2016


Que se passe-t-il quand on mélange la SF et la fantasy? On obtient ce livre qui par certains côtés évoque Les Enfants Indociles de Seanan McGuire et peut-être Jonathan Strange & Mr Norrell si on plisse très fort les yeux, mais je n'ai jamais terminé ce dernier donc peut-être que je me trompte complètement. Quel merveilleux début de chronique, vous ne trouvez pas?


Tous les Oiseaux du ciel s'ouvre avec Patricia et Laurence, deux enfants solitaires qui incarnent chacun un extrême de ce que les gens ont du mal à concevoir: la sorcellerie pour Patricia, la science-fiction pour Laurence. Mais à peine l'histoire de Patricia commençait-elle, avec sa découverte de ses potentiels pouvoirs, qu'elle perd ses capacités étranges et son parcours rencontre un obstacle. Quant à Laurence, son chemin semble un peu plus direct, mais c'est sans compter sur ses parents qui font de leur mieux pour s'assurer que leur garçon redevient un enfant "normal". Et pourtant, les deux protagonistes ne cessent de se croiser au fil des années, alors que leurs capacités respectives les tirent dans des directions différentes et façonnent le monde autour d'eux.


Voilà un livre bien étrange. Je ne suis pas complètement sûre de l'avoir compris parce qu'il ne cessait de m'échapper comme un savon entre des mains mouillées. Il est assez charmant, et je le recommanderais sans mal. Mais il est aussi embrouillé et compliqué en surface, ce qui selon moi reflète parfaitement la façon dont la vie s'embrouille et se complique en surface même si au fond ce n'est pas toujours le cas. Je ne savais pas à quoi m'attendre en commençant ce livre, parce que je n'avais pas vraiment prêté attention au résumé derrière. Je ne m'attendais certainement pas à y voir se mélanger autant d'éléments disparates - de la SF, de la magie, une pincée de dark academia, de la romance, une famille trouvée, et une apocalypse jetée là-dedans en plus. Je ne suis pas entièrement sûre que ça fonctionne, pour être honnête. Mais c'est un livre charmant, et qui a beaucoup de cœur.


Rep : personnage principal bi, univers très queer-friendly.


CW : scène de sexe explicite, relation familiale toxique.


Cajou, un chat tigré brun imposant, est mi-couché mi-dressé sur un lit,le regard vif, à côté du livre posé debout.


Baker Thief, Claudie Arseneault · 2018


Ce livre me fait de l'œil depuis fort longtemps. Dès que j'ai entendu boulanger + représentation aro / ace, j'étais convaincue. Mais bien sûr, un livre n'est pas une série d'items à cocher, et heureusement celui-ci est tellement charmant. C'est en partie un mystère, en partie un roman policier, en partie une romance (légère), avec des sorcières et une voleuse, le tout dans un récit mené tambour battant et enveloppé d'une atmosphère très cocon. Cela semble beaucoup, dit comme ça, mais c'est très facile à suivre. Malgré de nombreux personnages secondaires, je ne me suis jamais perdue et j'ai passé un excellent moment dans les rues de cette ville inspirée de Québec.


Dans ce roman, on rencontre Adèle, qui vient d'être recrutée comme officière de police après avoir été écartée de son ancien poste parce qu'elle fourrait son nez partout et insistait pour déterrer des scandales de corruption. La veille de son premier jour, une voleuse aux cheveux violets s'introduit dans son appartement en faisant preuve d'une rapidité suspecte et de beaucoup trop de répartie. Notre autre personnage principal, Claude, est le propriétaire et seul employé de la boulangerie où Adèle aime passer chaque matin pour une tasse de café et un croissant tout juste sorti du four. Elle est loin de se douter de la relation entre son nouveau boulanger préféré et la voleuse...


L'autrice, Claudie Arseneault, parle beaucoup d'identités LGBTQIA+ dans ce livre. Contrairement aux romans où nous, lecteurices queer, n'avons que des miettes à nous mettre sous la dents, ici tout le monde porte son étiquette avec fierté. Au début, je n'étais pas particulièrement à l'aise avec cette façon de mettre tout le monde dans des boîtes, mais après y avoir réfléchi, je trouve que c'est beau de la part de l'autrice de faire une place à tout le monde dans son livre. Cela le rend particulièrement réconfortant pour le lectorat queer, mais aussi plutôt éducatif pour le lectorat hétéro-cisgenre.


Enfin, l'autrice inclut une liste complète des avertissements de contenu au début du livre, avec les chapitres précis concernés par tel ou tel sujet.


Rep : Adèle est demisexuelle et a un trouble du genre asthmatique. Claude est racisé, gros, aromantique et genderfluide. La plupart des personnages sont queer également, et deux d'entre eux utilisent des néo-pronoms (ne/nem et ol/ols).


une main blanche tient un exemplaire du livre devant un buisson aux feuilles sombres et aux fleurs blanches.

 

Pour des avis plus fréquents sur mes lectures, je vous invite à aller faire un tour sur mon compte Instagram (il n’est pas obligatoire de s’inscrire) : https://www.instagram.com/mariebreta/.


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