Bilan lecture - Septembre 2020
Septembre et son atmosphère de rentrée s'accompagne souvent d'un regain de motivation chez moi. Cette année, et je pense que beaucoup partageront mon sentiment, je me suis sentie particulièrement anxieuse. J'ai passé les deux premières semaines à m'échapper dans un livre qui avait énormément de potentiel mais sur lequel je n'arrivais pas à me concentrer, avant de plonger dans l'étreinte chaleureuse d'un de mes livres préférés. Après ça, j'ai retrouvé une forme d'équilibre et j'ai continué à lire beaucoup, mais avec une meilleure concentration. Je place ça là pour expliquer la confusion de mon premier avis lecture qui reflète l'état dans lequel je me trouvais au moment de l'écrire, mais également le fait que c'est un livre déconcertant auquel j'espère rendre justice en le relisant l'année prochaine.
Ceci étant dit, en regardant mon bilan du mois j'en suis très satisfaite. Je n'ai lu que des livres écrits par des femmes, certaines extra-occidentales, et dans une variété de genres.
La Mer sans étoiles, d'Erin Morgenstern
Voici l'une de mes lectures les plus attendues de l'année. Dès que j'ai entendu parler de ce roman, j'ai senti qu'il fallait que je le lise, étant donné que l'un de mes sous-genres préférés est celui des livres qui parlent de livres. La Mer sans étoiles en est un exemple déconcertant. J'aurais bien du mal à vous en donner un synopsis, tant il y a d'histoires entremêlées. A la place, voici un aperçu de ce qui m'a traversé la tête pendant la lecture.
1/3 du livre. Je veux passer ma vie avec Zachary Ezra Rawlins, merci beaucoup. Mais où va l'histoire? Est-ce que les fils narratifs vont se recouper à un moment?
2/3 du livre. Je ne suis que CONFUSION. Que se passe-t-il? Qu'est-ce qu'il s'est passé dont je ne me rappelle pas mais qui est important pour comprendre l'histoire? Aurais-je dû prendre des notes?
La fin. J'ai un peu la même impression qu'avec The Raven Boys : c'est un livre que j'ai ouvert et qui m'a happée. Il ne m'a pas laissé le reposer après juste quelques minutes en sa compagnie. Il faut y consacrer de longues sessions de lecture, et laisser son esprit vagabonder dans un labyrinthe d'histoires jusqu'à en oublier où le roman s'arrête et où la réalité commence. C'est un livre à l'intérieur d'un livre à l'intérieur d'un livre, et si vous vous demandez pourquoi ce que je raconte n'a aucun sens, tout ce que je peux dire c'est : lisez ce livre et vous comprendrez.

Le Château de Hurle, de Diana Wynne Jones
Combien de fois avez-vous relu vos livres préférés? Ceci est ma cinquième visite du Château de Hurle et je croyais que je ne pouvais pas aimer ce roman encore plus, mais apparemment c'est possible. C'est une histoire enchanteresse, avec des personnages auxquels il est incroyablement facile de s'identifier (je suis tellement une Sophie) et une construction d'univers fascinante. J'adore le fait que tout ne soit pas expliqué : il reste de nombreuses zones d'ombre au sein de l'histoire et du monde, mais elles n'empêchent pas le.la lecteur.trice de se trouver une place dans le château et de s'y faire des amis.
L'adaptation par le studio Ghibli est une merveilleuse introduction à ce livre. Elle en capture l'atmosphère de la meilleure des manières, tout en explorant d'autres chemins tout aussi évocateurs.
En plus, ma famille m'a offert cette superbe édition de la Folio Society pour mon anniversaire, ce qui rend ma relecture d'autant plus spéciale.

La neuvième vie de Louis Drax, de Liz Jensen
Louis Drax est un petit garçon qui attire les accidents. A neuf ans, il a déjà survécu à plusieurs épisodes qui ont mis sa vie en danger. Le dernier l'a laissé dans le coma. Son médecin est déterminé à lever le mystère qui entoure son cas. Mais est-ce bien un problème médical? Deux voix alternent dans cette histoire : celle de Louis, qui mêle réalité et imagination, et celle de Pascal Dannachet, le médecin dont les certitudes volent en éclat suite à ses découvertes.
C'est un roman noir, très noir. Tordu, malaisant et glauque. Pas franchement ma tasse de thé, vous me direz, et vous aurez raison. Je l'ai découvert via la bande originale de l'adaptation cinématographique, composée par Patrick Watson. J'ai ensuite regardé le film et ai apprécié l'atmosphère et les touches de fantastique (et la musique), mais j'ai trouvé l'histoire très dérangeante. Ce n'est qu'après que j'ai appris qu'il y avait un livre. Je l'ai acheté dans l'espoir qu'il explore la dimension plus fantastique de l'histoire, mais l'autrice prend l'autre chemin et plonge en détails dans les pensées du médecin. Où il ne fait pas particulièrement bon se balader. Etant donné que le livre était rapide, je l'ai fini, mais s'il avait été plus long je l'aurais abandonné. Toutes les mises en garde de contenu : maltraitance d'enfants, relations toxiques.

Certaines n'avaient jamais vu la mer, de Julie Otsuka
Ce petit livre contemplatif est tout à fait unique. Il explore la perspective des femmes japonaises qui ont quitté leur foyer au début du 20e siècle pour rencontrer et épouser leurs fiancés japonais travaillant aux Etats-Unis.
Une grande partie du livre est écrite à la première personne du pluriel, "nous". C'est un peu déconcertant au début, mais j'ai vite admiré combien cela rendait la prose lyrique. Julie Otsuka écrit une polyphonie de voix venues d'un même milieu mais qui vivent un kaléidoscope d'expériences différentes. Un livre important sur le thème des Japonais-Américains et de leur traitement avant, pendant et après la deuxième guerre mondiale.

L'espace d'un an, de Becky Chambers
Ce livre a tout de suite rejoint ma pile de recommandations sur "comment se comporter comme un être humain décent". Honnêtement, ce devrait être une lecture obligatoire à tout âge. C'est le livre le plus inclusif et le plus respectueux que j'aie jamais lu. En plus de ça, on passe simplement un super moment, on rencontre un groupe de personnages fabuleux, et c'est une lecture qui vous laissera à bout de souffle et les yeux humides.
L'espace d'un an suit l'équipage du Voyageur, dont la mission est de ménager des trous dans l'espace pour permettre aux gens d'aller plus vite d'un point à l'autre de l'univers. Leur histoire est déjà fascinante, mais plus que ça, ce sont les relations entre les personnages qui m'ont rendu ce livre délicieux. Avec Binti, de Nnedi Okorafor, c'est le genre de romans qui me fait dire que peut-être, finalement, j'aime bien la science-fiction.

Trois Filles d'Eve, d'Elif Shafak
En bonne lectrice saisonnière, je ne pouvais pas passer septembre sans me plonger dans l'esprit "dark academia" - un sous-genre de romans qui se déroulent dans des environnements universitaires, avec des éléments de mystère, de suspense voire de surnaturel, dans la lignée de The Secret History (Le Maître des Illusions. Autant j'ai adoré ce dernier, autant c'est un roman sans diversité, masculin et avec un fort penchant pour la boisson.
J'ai lu Trois Filles d'Eve comme son pendant féministe et multiculturel. Notre héroïne est Peri, une femme turque que l'on suit à deux moments de sa vie. D'une part, elle est un membre établi de la haute société d'Istambul. Elle voit ses fondations se fissurer après que des souvenirs enfouis refont surface. D'autre part, on la rencontre dans sa jeunesse et ses premières années à l'université d'Oxford. Là-bas, elle a l'occasion de participer à une conversation sur un sujet qui ne crée que des conflits chez elle - la religion. Un séminaire en particulier attire son attention. Il s'intitule sobrement : "Dieu".
Elif Shafak mêle brillamment les deux époques dans son roman, et présente aux lecteurs un portrait tout en finesse de cette femme qui doute. A travers ses différents personnages, elle offre une vision kaléidoscopique des femmes du Moyen-Orient, loin des clichés et des raccourcis, tout en régalant les amateurs et amatrices de "dark academia" avec son récit honnête des victoires et des combats d'une étudiante étrangère dans la cité des clochers rêveurs.

Pour des avis plus fréquents sur mes lectures, je vous invite à aller faire un tour sur mon compte Instagram (il n’est pas obligatoire de s’inscrire) : https://www.instagram.com/mariebreta/
Qu'avez-vous lu en septembre?